Ehlers-Danlos - Combativité vs. Engagement - relations avec l'équipe médicale

Publié le par Cascades

Cet article parle de la manière d'aborder le handicap, des relations avec le personnel soignant, plus ou moins compréhensif ou compatissant. Et surtout : comment améliorer ces relations.

Dans mon cabinet de radiologie, il y a cette pancarte-là, qui a été mise suite à de nombreuses agressions verbales envers les secrétaires médicales.  "Le  personnel n'est pas un punching-ball.  Vous avez droit aux soins, l'équipe médicale a droit au respect". Cette phrase illustre bien ce qu'on pense des patients : ils n'ont pas forcément droit au respect...

Dans ce cabinet en particulier, un des médecins radiologues est très brutal en parole et en actes (sympa la brutalité pour une écho vaginale...) et les secrétaires sont aimables comme des portes de prison. Même si je ne cautionne pas la violence verbale, je ne suis pas étonnée qu'il y en ait dans ce lieu, où les patients n'ont pas droit au respect.

Se faire respecter par un médecin, ce n'est pas forcément facile avec un SED. Si comme moi, vous avez vécu une longue période d'errance médicale avec des diagnostics proposés aussi variés que la dépression, la bipolarité, l'allergie aux changements de température (ma préférée !), vous voyez peut-être votre syndrome d'Ehlers-Danlos comme un combat permanent, avec la sensation que l'agressivité du mode "warrior" vous donnera l'énergie nécessaire pour ce parcours de soin qui n'en finira jamais.

Chez moi, des éléments supplémentaires ont renforcé cette impression que la vie est un combat. Cela va des petites phrases type "il faut souffrir pour être belle", "tu gagneras ta vie à la sueur de ton front", au fait que, sans être un garçon manqué, j'ai choisi un métier d'homme, dans un milieu d'hommes (pas par bravade, c'est juste dans ce domaine que je suis bonne...).

Alors, depuis quelques années, j'essaie de ne plus envisager mon existence comme un combat permanent. La lutte est inefficace et me prend beaucoup d'énergie, je dois accepter ce que je ne peux pas contrôler, mais pour autant, je ne peux pas laisser tomber mon besoin d'être soignée correctement. C'est une petite phrase de ma psy au centre de la douleur qui a fait "tilt" : ne pas confondre combativité et engagement.

Comment communiquer avec le personnel soignant, afin qu'il comprenne mon engagement, le fait que je ne laisserai pas tomber ? C'est encore super-psy qui m'a donné des pistes sur les différents styles de communication, sur l'affirmation de soi.

Voici des extraits de ce qu'on m'a exposé :

Les styles de communication

  Mes besoins Les besoins des autres
Passif - ++
Agressif ++ -
Affirmé + +

 

On peut passer très facilement de passif à agressif, car ce sont des modes de communication émotifs. Le juste milieu, le mode de communication le plus efficace, c'est affirmé. On ne laisse pas l'émotion déformer le message.

 

Le comportement non-verbal et paraverbal

 

Passif

Agressif

Affirmé

Volume sonore

faible

fort

adapté

Timbre

Sourd, nasal, voilé

Eraillé, forcé

Clair

Débit verbal

Rapide ou trop lent

Trop de mots

Posé, ponctué

Articulation

Mauvaise articulation

Articulation rapide

Bonne articulation

Contact visuel

Fuyant

Insistant

Présent sans être intrusif

Mimique faciale

Figé, peu expressive

Tendue

Calme et détendue

Posture

Manque de tonicité

Tendu et crispé

Tonique et posé

Distance interpersonnelle

Lointaine

Trop proche, intrusive

Respectueuse

 

La demande

Pensées empêchant la demande ou la rendant agressive :

- Si je demande, je dois obtenir.

- Demander directement, précisément, c’est mal élevé.

-  Si je demande, je m’impose à l’autre.

-  Si on me refuse une première fois, ce serait mal poli d’insister.

-  L’autre doit deviner mes besoins.

 -  Ma demande va déranger l’autre.

-  Il est inutile de demander ce qui sera refusé.

 

Pensées facilitant la demande ou la rendant acceptable :

- Je peux demander, mais je dois accepter que l’autre refuse.

- Une demande directe est claire pour l’autre qui sait à quoi s’en tenir.

- Grâce à l’empathie, je le laisse libre de choisir sa réponse.

- Il est souvent nécessaire de persister dans une demande pour obtenir.

- Faire d’abord la demande et demander ensuite si elle dérange.

-  On ne peut être sûr que ce sera refusé.

-  De toute façon, même en cas de refus, je serai au moins content de moi d’avoir demandé.

 

J'ai longtemps cru que je devais paraître sympathique, joviale pour être mieux soignée.  Ou faire pitié lorsque j'étais trop mal. Effectivement, cela va mieux marcher pour certains médecins, qui ne comprennent pas que je puisse expliquer que la douleur est à 9 alors que mon visage ne montre aucune émotion.

(Dans mon cas, c'est facile à expliquer, vu que la douleur est aussi sur mon visage : si je contracte les muscles de mon visage, j'augmente la douleur. Donc je ne pleurniche pas, je ne grimace pas. Je parle juste doucement...)

Je m'aperçois avec ces techniques de communication, que l'efficacité de ma demande est accrue si je laisse de côté l'émotivité tout en étant parfaitement polie et respectueuse de la personne en face (le sourire est en option en fonction du contexte...). Cela a aussi un autre aspect positif, car je m'implique moins émotionnellement, donc je digère plus facilement le peu de pouvoirs qu'ont certains médecins. J'attends moins d'un médecin qu'il soit le sauveur.

Pour éviter de laisser parler l'émotivité, je prépare tous mes rendez-vous à l'écrit, même s'il n'y a que 2 mots écrits sur la feuille (en plus de la date et du nom du médecin). Et je note les réponses données à l'écrit lors de la consultation. Cela me permet d'une part d'être sûre que je poserai toutes les questions importantes, mais aussi, cela me fait un mini-journal de bord, qui me permet de ne pas reposer les mêmes questions plusieurs fois à un médecin.

D'après une étude citée dans Psychologies Magazine, il a été observé qu'un patient qui s'adresse à son médecin ne dispose que de 18 petites secondes en moyenne avant que celui-ci ne l'interrompe pour lui poser une question. De mon expérience, parfois, le médecin commence l'examen à la place de poser la question. Autant dire qu'il faut être direct et efficace dans les demandes...

 

Exemples de questions pour le médecin :

- "j'ai ce nouveau problème, est-ce qu'il y a des choses qui pourraient me soulager ? Est-ce que je peux faire quelque chose de mon côté ?" (là, le médecin comprend que je m'engage)

- "quand est-ce que je reprends rendez-vous avec vous pour le suivi ?"

Cette dernière phrase est très importante, et souvent, le médecin prend le temps de réfléchir avant de répondre, et j'ai l'impression, s'intéresse un peu plus à mon problème.

En posant la question du suivi, le médecin comprend mon engagement et aussi le fait que je tiens à ce qu'il s'engage aussi. Il comprend aussi assez explicitement que je ne lâcherai pas l'affaire et que j'attends de sa part une réponse/aide/solution.

De mon côté, avoir la date de suivi me permet de gérer mes futures demandes à ce médecin, et de me donner une échéance pour la résolution de mon problème. Je peux donc me permettre de ne pas m'angoisser jusqu'à cette date smiley.

 

J'espère que ces quelques pistes pourront vous aider. Nous avons parlé de la notion de l'engagement et comment amener le médecin à être (presque) aussi engagé que soi. Je parlerai dans un prochain article de comment les médecins nous voient, nous les patients douloureux chroniques qu'ils n'arrivent pas à soigner. Cela sera aussi un article un peu long parce qu'il y a du boulot wink.

 

J'espère que cet article vous a plu. Je vous invite à laisser des commentaires et remarques ci-dessous. (seul un pseudo suffit, pas besoin de mail). 

Voici des liens sur 2 articles qui complètent bien ce sujet. A bientôt !

 

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